David Willetts, Ministre pour les Universités et la Science, a annoncé le 16 juillet 2012 que le gouvernement britannique acceptait la plupart des recommandations énoncées dans le rapport intitulé "Accessibility, sustainability, excellence: how to expand access to research publications" émanant d'un groupe de travail coordonné par Janet Finch et publié le 18 juin.
Ce rapport, dont vous trouverez la traduction en français (assurée par le service de traduction de l'INIST-CNRS) du résumé sur le site de l'INIST-CNRS dédié à l'Open Access, réaffirme le principe que les résultats de recherches conduites à l'aide de fonds publics devraient être accessibles à tous. Il recommande au gouvernement anglo-saxon l'adoption rapide d'une politique d'Open Access.
Une étape de transition s'appuyant sur la voie dorée « hybride » (les périodiques commerciaux publient certains articles en Open Access et continuent de facturer les autres articles à leurs lecteurs) plutôt que sur la voie verte (les chercheurs déposent eux-mêmes leurs articles publiés sur une archive institutionnelle après les avoir soumis à une revue) se fixe l'objectif de respecter l'équilibre fragile d'un écosystème complexe réparti en :
- éditeurs commerciaux ou non (sociétés savantes),
- organismes de financement
- universités et institutions publiques
- chercheurs
Cette préférence pour la voie dorée est aussi préconisée par le DFG (Deutsche Forschungsgemeinschaft, l'agence de financement principale en Allemagne) qui considère que la voie verte est juridiquement moins sûre.
Le JISC, l'organisme qui (entre autres) négocie les licences nationales en Grande-Bretagne mettra à disposition son expertise dans la collecte et l'analyse des données pour mesurer les progrès de l'adoption l'Open Access et a annoncé qu'il travaillerait :
- à la réalisation des recommandations par le biais de son « Open Access Implementation Group » (OAIG)
- à l'amélioration de l'infrastructure des archives de dépôt
La Publishers Association (PA), impliquée dans l'initiative à l'origine du rapport Finch -sans toutefois intervenir dans sa rédaction- se déclare solidaire du "paquet équilibré" des recommandations qui y figurent. Pour s'assurer que cet équilibre perdure, la PA insiste toutefois sur plusieurs points clés :
- la présence de fonds suffisants, mis à disposition des chercheurs pour régler les frais de publication des articles (APC) aux éditeurs
- la mise en place de circuits financiers
- une période d'embargo demandée ne soit pas inférieure à 12 mois quand les fonds pour la voie dorée ne sont pas fournis
- la bonne foi dans la négociation des extensions de licences dans les secteurs (universités et secteur de la santé) qui profitent déjà d'un certain libre accès
Les Research Councils UK (RCUK) ont annoncé leur nouvelle politique le 16 juillet, après avoir pris connaissance du rapport Finch, pour harmoniser et modifier leur politique précédente dans le domaine de l'Open Access. Elle prendra effet au 1er avril 2013. L'objectif d'augmenter la publication en Open Access est visé en encourageant parallèlement les périodiques à se convertir à la voie dorée ou à réduire leurs périodes d'embargo pour la voie verte. Les RCUK imposeront donc que les articles de recherche qu'ils financent et qui sont évalués par les pairs soient publiés dans périodiques qui offrent, au choix :
- une option "payer pour publier" (voie dorée) ainsi que l'adoption d'une licence de type CC-BY pour ces articles
- la possibilité aux chercheurs de déposer leurs articles, dotés d'une licence de type CC-BY-NC, dans une archive institutionnelle (voie verte) après une période d'embrago acceptable (de 6 mois pour les sciences naturelles à 12 mois maximum pour les sciences humaines)
Si le périodique choisi propose les deux options, le chercheur devra choisir la voie dorée.
Après avoir été enthousiasmé par cette mise à jour, Steven Harnad met désormais en garde contre la formulation de cette dernière phrase. Il estime en effet que cette politique incitera plutôt les éditeurs à choisir immanquablement la voie dorée hybride payante. Comme mesure de correction simple, il propose donc de laisser l'auteur choisir entre la voie dorée et la voie verte lorsque les deux sont possibles.
SPARC Europe salue l'orientation prise vers l'Open Access mais déplore le coût impliqué dans le type de transition recommandée et exprime ses inquiétudes et sa déception d'un texte qui ne va pas assez loin sur plusieurs points. Il est notamment reproché au rapport Finch de ne pas s'appuyer sur l'existant et d'ignorer le fait que la grande majorité du contenu accessible en Open Access en Grande-Bretagne actuellement est fourni par le Green OA (voie verte) (35% des résultats de la recherche britannique, contre 5 % pour la voie dorée) qui repose sur un réseau national de dépots interopérables.
Peter Suber, directeur du Harvard Open Access Project et senior researcher à la SPARC (Scholarly Publishing and Academic Resources Coalition) se décrit lui-même comme étant favorable aux deux voies en raison de leur complémentarité. Il reproche néanmoins aux rapports britannique et allemand de ne pas avoir compris les avantages de la voie verte (par manque d'information, ou même l'utilisation d'informations erronées) et donc de ne pas en tenir compte dans leurs stratégies. Il rappelle par exemple que :
- le Green OA est l'approche très largement majoritaire (près de 100%, sur des dépôts comme ArXiv) choisie dans le champ des sciences physiques, sans que deux des éditeurs principaux, American Physical Society et Institute Of Physics, n'aient eu à déplorer d'annulation d'abonnements à leurs revues
- beaucoup d'éditeurs "conventionnels", comme l'IEEE ou le groupe Nature, non seulement permettent le green OA mais l'encouragent et estiment qu'il est compatible avec les modèles économiques d'abonnements payants
Il déclare que les craintes des éditeurs à propos du green OA ont été exagérées, alors même que certains d'entre eux les dénonçaient et demande que les éventuels torts causés par le green OA soient examinés à la lumière de preuves tangibles, quitte à réadapter les politiques au fil de l'eau. Il décrit ainsi longuement et précisément les dynamiques en jeu dans sa lettre d'information.
Cette réhabilitation de la voie verte est également demandée par Paul Ayris (director of library services at University College London) dans son article du Guardian, qui estime en outre que la voie dorée est une solution coûteuse qui bénéficiera essentiellement aux éditeurs de périodiques.